Ivres de pluie et d’étoiles

Tip ! Flip ! Flac ! Tip ! Flip ! Flac ! Comme un écho à mes blessures, j’entends la course des pas de l’autre côté de la rue, de l’autre bord du pont. Lentement je me retourne. Mes yeux scrutent la pluie et la nuit qui s’annonce. Tip ! Flip ! Flac ! Tip ! Flip ! Flac ! La pluie inonde le bitume et mes pieds. A la lueur des lumières de la ville qui scintillent dans l’obscurité je distingue sans mal l’ombre d’une silhouette. Oui, il y a quelqu’un là-bas, une ombre qui retient entre ses bras, la douleur. Dans la nuit, elle se reflète dans les flaques, elle flotte, en suspend, comme dans une attente informulée, mais elle est si proche du bord, si proche du vide que mon souffle a peur.
Il y a comme une pause dans l’air. Le vent a cessé un instant, laissant une trouée dans le ciel. La pluie pourtant ne cesse de tomber, mais de la percée se faufilent des étoiles, une myriade d’étoiles et c’est comme si le soleil revenait, comme quand les giboulées nous agressent d’un coup et puis l’instant d’après nous éclaire. Il y a comme une pause dans laquelle je franchis l’espace.
Je m’élance. De grandes foulées comme jamais je n’en ai jamais fait. Ma progression reste silencieuse, la pluie et le vent prolongent le silence. Et pourtant j’entends. J’entends, comme un écho, le cri muet qui s’échappe de son corps, mais je suis tout près à présent et mes bras l’enlacent fermement.
Fragile silhouette, ombre gracile que mon corps retient, la happe vers les lendemains. Elle est si légère.
Je vois ses larmes que la pluie balaie, et dans les gouttes qui se perdent sur son visage je lis les étoiles à l’intérieur. On titube sous la force du vent, un peu ivres de pluie et d’étoiles mais on s’ancre l’un à l’autre.
Mes doigts caressent les gouttes sur ses joues, il y a un sourire dans ses yeux, je crois bien que c’est le mien, mais le sien n’est pas loin.

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