Pour septembre l’agenda ironique est double. Deux thèmes concoctés par Carnets et l’ Écrevisse L’un qui nous entraîne dans une forêt, la nuit à la rencontre de rouge-fillettes et de loup déguisé, l’autre, qui donne sa longue au chat.
La nuit n’aurait pas pu être plus sombre. Même les étoiles avaient déserté les lieux. Une de ces nuits sans lune au ciel lourd chargé de nuages noirs. Bref, une nuit de rentrée scolaire qui plombait un peu l’ambiance festive alors qu’il était question d’intégration. Cela n’avait pas détourné pour autant la majorité des étudiants de venir faire un tour dans la forêt, lieu de la soirée. Les paquets de chips aux saveurs multiples remplissaient les ventres et les boissons au goût prohibé coulaient à flots. On avait fait appel à Lou, un type à l’allure nocturne qui se fondait dans le décor avec une rare élégance. Il aimait se mêler incognito à ces fêtes étudiantes, il connaissait l’art de la dissimulation. Il était en charge de s’occuper de la musique et avait un réel talent pour cela. Des rythmes mélodieux alternaient avec des airs déchaînés au grand plaisir des filles présentes. La plupart étaient vêtues de noir et se déhanchaient à la lueur blafarde des lampes-tempête. Leur ombre s’invitait entre les arbres, créant au gré de leurs mouvements des volutes sinueuses, attirant les jeunes mâles en quête de sensations troublantes. Parmi elles se mêlaient quelques rouges-fillettes, des filles toutes de rouge vêtues jusqu’à leur capuchon pointu. On disait d’elles qu’elles entretenaient le mystère et beaucoup rêvaient de leur ôter leur chaperon afin d’apercevoir qui se cachaient dessous. Lou espérait bien être le premier à soulever le tissu écarlate, le premier à saisir sa chance d’entrevoir la frimousse d’une des rouges-fillettes. Parfois lorsqu’elles dansaient, elles laissaient entrevoir le bord des lèvres vermeil, un nez fin, un menton volontaire, la blancheur d’une joue, un cou gracile. Enfin, l’imaginait-il.
Il avait beaucoup d’imagination Trop, disait-on dans sa famille. Il avait pourtant été élevé comme ses frères, avec un enseignement clair et direct, sans fioriture. L’important était d’aller à l’essentiel. On croque et on discute après. Lou avait cependant un fâcheux penchant à inverser la tendance. Il appréciait prendre son temps, une dégustation lente, où les mots font miroiter de beaux voyages. Généralement les filles ne résistaient pas à la tentation d’une virée dans les bois. Elles aimaient son timbre grave, ses manières raffinées. Il s’appliquait à ne jamais paraître féroce, il se prétendait un tendre. Seul son sourire, légèrement carnassier laissait supposer un intérêt certain pour la chair fraîche. Mais il était loin d’être le seul à priser cela, constata-t-il en considérant les jeunes gens qui s’attiraient comme des aimants. Son attention se tourna vers une rouge-fillette qui venait vers lui. La démarche volontaire, un brin arrogante, il devinait plus qu’il ne voyait le sourire étirer ses lèvres. Son parfum avait l’odeur des fruits défendus, un effluve sacrément tenace qui faisait battre son cœur trop fort. Surpris il recula. L’assurance qu’elle dégageait lui faisait même un peu peur et lorsqu’elle l’attira à elle, il se demanda si le monde soudain ne tournait pas à l’envers.
Donne ta langue au chat
17h30. Dans la foule des lycéens, Elle retrouve Lui, après la sortie des cours à attendre le bus. Lui pense que c’est une fille intimidante, un peu agaçante, très attirante. Elle est curieuse, impatiente. Elle pense que Lui est un garçon distant, silencieux aux yeux pleins de mystère. Ça lui plait même si elle ne se l’avoue pas.
- Allez, dis-moi ! Rien qu’à moi, dis-moi ce que tu éludes depuis tout à l’heure ! dit-Elle, suppliante.
- Je ne suis pas certain que ça soit le moment.
- Ah bon ? Il faut un moment pour ça ? Quel moment ? Quand ?
- J’en sais rien… Tu me mets la pression avec tes questions ! s’exaspère-t-il
- Eh bien dis-moi, comme ça plus de pression !
- Ah ! Ah ! Bien essayé !
- Ah, tu m’énerves. J’ai l’impression d’être face à un gardien des secrets !
- Et toi serais-tu chasseresse, à traquer les mots silencieux ? demande-t-il le ton taquin.
- Encore faudrait-il que je les entende !
- Ben, tu pourrais… Oui, tu pourrais, si tu le voulais réellement, réplique-t-il en la considérant attentivement.
- Ça c’est pas sympa. Comment veux-tu que je sache ce que tu as dans ta caboche ! Tu crois que tu peux savoir ce qu’il y a dans la mienne ?
- Hum… voyons… fait-il mine de réfléchir.
- Je t’interdis de prétendre qu’il n’y a rien dans la mienne, s’affole-t-elle.
Il éclate d’un rire, il a envie de l’enlacer, se retient de la toucher.
- Oh et puis j’en ai marre ! Ça me fatigue ! Je renonce ! Je donne ma langue au chat ! s’exclame-t-elle, soudain lasse du jeu.
- Vraiment ? dit-il et s’approchant. Vraiment ? répète-t-il tout près d’elle maintenant. Dans ce cas, je veux bien te la prendre !
Hello ! Quand dévoileras-tu le thème d’octobre ?
À moins que tu ne refuses l’octroi qui t’as été fait 😦
Bonne soirée et à bientôt 😀
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Je rentre juste de week-end… j’accepte avec plaisir, il faut juste que j’y réfléchisse 😉 A très vite !
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Super 😀 À très vite 😀
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Le premier texte est inquiétant juste ce qu’il faut …
Quant au second il me donne envie d’être une petite Souris à la sortie de
Lycée pour entendre ce qui s’y dit 🙂
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La première histoire est très bien amenée tout en douceur…On se demande de quelle chair il raffole ce Lou!
Le dialogue est très doux aussi, très tendre. Entre taquineries et révélations!
J’ai bien aimé!
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Merci Émilie 🙂
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Ces belles rencontres me rappellent bien des choses. Merci de l’avoir si joliment dit. C’est rafraichissant.
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Merci d’être venue lire, les premiers émois de la rentrée Jacou. 🙂
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Voilà deux rondes qui s’enchaînent merveilleusement, où l’on voit que même l’arrivée de l’automne n’empêche pas certaines fleurs de s’épanouir !
J’aime !
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Merci pour le joli commentaire. J’aime bien l’idée que l’automne soit aussi source d’épanouissement 🙂
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Dans le premier texte, on se demande qui est le plus féroce des deux… j’aimerais bien connaître la suite!
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Se méfier des apparences… elle peuvent se révéler trompeuses !
Une suite ? Ah ! Il y aurait tant à dire ! 😉
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En tout cas, tu peux dire aux lycéens qu’ils sont une source d’inspiration réussie. Quel brio ! Celui de remplir le premier challenge du loup déguisé, et le second de donner sa langue au chat.
Mais pour être sûre, le loup, c’est un chat ? Ou bien… ?
C’est un p’tit rien égarant… Oh, mais juste un p’tit rien ! 😀
Bien trouvé cette progression. Quelle écriture !
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Ah ! Ah ! J’aime bien égaré mes lecteurs ! 😀 Tu peux aussi imaginer à qui appartient la langue ! 😉
Merci beaucoup jobougon, ravie de savoir que tu as apprécié mon inspiration lycéenne.
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une jolie façon de rendre l’ambiance très chargée de ces rentrées scolaires où les enjeux ne sont pas que ‘studieux’…..les ‘enseignements’ étant multiples 🙂
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Oui !!! C’est exactement ça Malyloup ! C’est l’âge des enseignements multiples. 🙂
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Jolie variations actuelles (rentrées scolaires i compris) et intemporelles 🙂 !
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Rentrée scolaire, oui. Il faut dire que l’inspiration est facile. J’habite près d’un lycée 🙂 Merci Carnets !
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